Pour notre visite d’Octobre du passeport du réseau SD, nous avons changé de continent une fois de plus, et avons volé – sans émission de carbone – en Inde. Nos hôtes étaient Valli et Rajan, directeurs de la Fondation Anisha, qui travaille avec les agriculteurs sans terre, les petits propriétaires, les enfants et les familles du Karnataka, à améliorer leurs moyens de subsistance.
Comment Anisha est né
Valli a commencé par décrire comment elle a commencé à travailler avec les familles des rues et les habitants des bidonvilles de Bangalore en 1995.
Certaines familles de ces bidonvilles vivaient sur les toits-terrasses, essentiellement dans de petites ‘boîtes’ (voir les photos). Elles passaient toute la journée dans la rue, à mendier, et tout ce qu’elles obtenaient servait à leurs dépenses quotidiennes.
Leurs habitations improvisées n’avaient ni eau courante, ni traitement des déchets et ils devaient utiliser les toilettes publiques. C’étaient les familles les plus pauvres, qui vivaient de la nourriture vendue dans la rue, sans installation pour faire la cuisine ni avoir le temps de cuisiner.
Valli a décidé de travailler avec des familles de personnes âgées, des familles unipersonnelles, des mères célibataires et des familles nombreuses dans le quartier du marché du centre-ville.
Elle voulait aussi travailler avec les enfants, qui étaient pratiquement laissés vagabonder dans les rues pendant que leurs parents vendaient dans la rue. Le projet n’avait aucun endroit pour fonctionner, mais l’équipe de Valli a réussi à construire une petite salle de classe avec des matériaux de construction recyclés, et ils ont commencé à donner une éducation pré-primaire à des enfants âgés entre trois et six ans.
À six ans, les enfants pouvaient aller dans des écoles du gouvernement, ou des écoles privées par l’intermédiaire d’un parrainage arrangé par Anisha.
Il y avait aussi une classe supplémentaire, ou un programme postscolaire, auquel 136 écoliers assistaient, qui aidaient les enfants dans leurs devoirs, ce que leurs parents – qui n’avaient pas eu d’éducation – ne pouvaient pas faire. Tant qu’Anisha a travaillé avec ces familles, il n’y a pas eu d’échec scolaire, et tous les enfants concernés ont eu de bons résultats et sont passés dans la classe supérieure. Ces enfants étaient les premiers dans leurs familles à aller à l’école.
Le Programme d’Anisha d’Économies des Enfants a aidé des jeunes gens à économiser l’argent que leurs parents leur donnaient pour la journée et qu’ils avaient normalement l’habitude de dépenser à de la malbouffe. Et il y avait aussi un programme de micro-crédit pour les femmes, qui les aidait à éviter les taux d’intérêt élevés pratiqués par les prêteurs.
Anisha a travaillé à ce projet urbain entre 1995 et 2008, et a apporté des améliorations physiques au bidonville, dont la construction de trottoirs et d’une salle de classe communautaire, donnant à chaque foyer accès à l’alimentation en eau potable et à l’électricité.
Pendant cette période, l’équipe d’Anisha a mené une petite étude de recherche et appris que la plupart des marchands ambulants qu’ils avaient rencontrés vivant dans le bidonville, avaient émigré de zones rurales. Ils ont visité certains des villages d’où venaient ces gens et ont découvert que l’agriculture n’y était pas rentable, c’est pourquoi les gens émigraient.
Ceci les a mené à se demander: « Pourquoi ne traitons-nous pas la racine du problème? »
Retour aux racines
Dans la seconde partie du webinaire, nous avons regardé un court film qui établit la scène de l’environnement rural dans lequel Anisha a commencé à travailler, et où il continue à opérer maintenant.
« Le Martalli est entouré de montagnes et de forêts. La région est collée dans la sécheresse et maudite par la nature, » nous dit le narrateur. C’est une région ‘d’ombre de la pluie’, ce qui veut dire que la pluie tombe sur tous ses côtés, mais beaucoup moins dans le Martalli lui-même. Apparemment, dans le passé, les villageois des contreforts des montagnes pouvaient s’en sortir avec des activités agricoles minimales, et l’eau qui s’écoulait des montagnes suffisait à remplir les puits et les étangs.
Cependant, une série d’évènements s’est produite qui a mené à la dégradation des conditions agricoles. Tout d’abord, les gens des tribus vivant dans les montagnes ont émigré de leurs villages à cause de la construction du barrage de Mettur au Tamil Nadu.
Dans la vallée, la forêt a été déboisée et la culture a commencé. À peu près au même moment, le maïs a été introduit dans la région, et la compagnie qui le vendait a vendu aux villageois le rêve d’une culture marchande lucrative. Graduellement, comme les gens pompaient l’eau pour ces cultures, le niveau de la nappe phréatique a baissé, et la fertilité du sol a été endommagée à mesure que les gens étaient encouragés à utiliser des pesticides.
En 2006, Anisha a démarré son travail au Panchayath du Martalli, dans l’état du Karnataka. Ils sont allés à la rencontre des petits cultivateurs et ont commencé à élever la conscience des méthodes d’agriculture biologique et naturelle, dans le but d’améliorer les moyens de subsistance et aider à freiner l’émigration.
La formation a commencé au niveau du village avec des démonstrations dans les champs locaux, motivant les petits propriétaires à faire des essais sur leurs petits terrains. Au début, les paysans avaient des doutes, mais ils ont vu les résultats positifs, leur apportant de bonnes récoltes pour moins de dépense.
L’étape suivante était la collecte et la conservation de semences indigènes. Anisha a aussi apporté son aide en enlevant de grosses pierres de la terre, en construisant des réservoirs à vermi-compost, des tambours pour la préparation d’engrais et de pesticides biologiques, et de pulvérisateurs.
Une autre des initiatives d’Anisha a été la formation de groupes d’entraide pour les femmes, avec leurs économies et un crédit fourni avec un taux d’intérêt minimal. Les initiatives entrepreneuriales des femmes comprennent l’élevage du bétail et la fabrication de produits médicaux ainsi que de produits alimentaires pour les réceptions et les évènements.
Le centre de ressources d’Anisha héberge la banque de semences et est un centre de formation avec des parcelles de démonstration qui montrent comment il est possible de cultiver sur des parcelles de terrain rocailleuses en utilisant un minimum d’eau. Il est alimenté et éclairé par l’énergie solaire et le biogaz, et collecte l’eau de pluie.
Comment Anisha s’est-il développé avec les années? À ce jour, il a formé plus de 2000 agriculteurs, couvert 80 hectares de terre sèche et de terre humide, conservé 306 variétés de semences indigènes, et impliqué 1800 étudiants dans les jardins potagers.
Après la vidéo, la place a été donnée aux commentaires et aux questions. Hillel Natanson, ancien volontaire de SDIA, a commenté qu’il avait vu Valli faire une présentation – avec des bouts de papier – à Bangalore au début des années 2000. Voyant la lumière dans les yeux de Valli, il s’était dit à lui-même: « Cette femme va faire de grandes choses ».
Élever des enfants, élever des plantes
La troisième partie de la visite nous a amenés au Projet de Jardin Potager d’Anisha, commençant avec une autre courte vidéo.
Le projet de Jardin Potager biologique a commencé en 2013 comme pilote dans 16 écoles. Il avait plusieurs objectifs, dont mettre fin à la malnutrition des enfants, dont les signes – comme les enfants approchant le texte de leurs yeux pour lire – étaient évidents dans la communauté locale.
Quand le projet a démarré à l’école en 2016, les enfants hésitaient au début à s’engager, mais la participation des enseignants, la guidance et la formation constantes d’Anisha ainsi que la curiosité naturelle des enfants ont fait du projet un succès.
Il a débuté avec 23 écoles, avec des jardins de démonstration qui montraient qu’il était possible de cultiver dans un petit espace, et a appris aux enfants que, juste comme les humains, le sol a besoin des nutriments appropriés pour le maintenir en bonne santé.
Le projet a affronté des défis, bien sûr. Des enseignants devaient sacrifier des classes à Anisha, mais les impliquer dans le processus de planification les a mis dans le bateau.
Des jeunes participants au programme ont dit que manger de la nourriture produite à la maison leur donne de la joie, et que les fruits et légumes biologiques ont meilleur goût. Et, de plus, les familles économisent sur la nourriture de l’argent qui peut alors être dépensé pour d’autres choses. Les légumes du jardin potager vont même dans les repas de l’école.
En conclusion, ce projet ne concerne pas seulement faire pousser des légumes et améliorer la nutrition des familles, mais également libère de l’argent pour d’autres choses comme les fournitures scolaires, etc. Il répand les nouvelles sur l’agriculture biologique, comme des voisins partagent les semences et leur nouveau savoir sur l’agriculture naturelle. En outre, selon Valli, le projet donne aux enfants une occasion de trouver quelque ‘paix et réconfort’ dans un environnement naturel, améliorant ainsi leur santé mentale et leur bien-être.
Tout cela, plus son impact à sauver des vies pendant la pandémie quand les familles ont pu se nourrir avec les légumes qui poussaient dans ces jardins potagers.
Après la vidéo, Marilyn Schirk a commenté qu’elle avait visité le projet en personne mais, que voir tout cela mis ensemble et être témoin de ce que quelques personnes seulement avaient accompli pour apporter un changement dans une région spécifique, lui donnait beaucoup d’espoir – et que ce que Valli fait dans cette région est unique et une source d’inspiration.
Des graines ont été plantées
La quatrième et dernière partie du webinaire concernait la plus récente action d’Anisha pendant la pandémie du coronavirus, incluant ses efforts d’assistance.
Quand la pandémie a démarré, Anisha travaillait dans 23 écoles et devait terminer son cycle (financé par la Fondation Guru Krupa et les SD Nationaux) en 2020. Cependant, le projet ne pouvait pas être convenablement achevé parce que le Covid rendait le rayonnement impossible et l’équipe d’Anisha était limitée à travailler au centre de recherche.
Malgré cela, parce que certains étudiants avaient le téléphone chez eux, Anisha a commencé à les contacter par téléphone pour leur donner des conseils et vérifier comment cela allait. Beaucoup de jeunes gens ont étendu leurs jardins pendant la pandémie, et commencé à cultiver plus d’espèces et donner des graines à leurs voisins. Ils en étaient venus à dépendre des jardins pour la nourriture quand les boutiques étaient fermées, et de nombreux travailleurs étaient rentrés au village depuis les zones urbaines.
C’est à ce moment qu’on a pleinement réalisé l’importance des jardins domestiques. Les gens n’avaient ni travail ni revenu – mais, au moins ils avaient les légumes du jardin.
Dans les stades initiaux de la pandémie, Anisha n’était pas certain de comment il allait aider. Il était impossible d’aider des villages entiers, parce que le besoin était trop grand – tout le monde était dans la même situation.
Anisha a identifié des familles où il y avait des cas de COVID ou des gens dans le besoin parce que la maisonnée s’était brusquement accrue, et il assistait des familles avec une aide alimentaire fournie par des dons du réseau Susila Dharma et de la Fondation Guru Krupa. Plus de 3000 familles de 21 villages ont été assistées, et le travail d’assistance a continué cette année.
L’aide médicale était aussi un problème. Il faut trois heures pour atteindre l’hôpital le plus proche depuis Martalli et, même quand vous y arrivez, il n’y a pas assez de lits. Beaucoup de personnes souffrant de maladies cardiaques dans la région, Anisha avait déjà décidé d’acheter une ambulance pour traiter ce problème d’accessibilité médicale. L’ambulance est arrivée en Mars 2020, et a servi immédiatement pour les patients du COVID. Anisha avait envisagé d’embaucher un chauffeur pour l’ambulance, mais personne ne s’est présenté, aussi Rajan a joué ce rôle.
L’école a commencé de nouveau. Pendant la pandémie, la relation entre Anisha et les étudiants a grandi et s’est développée à cause du contact accru par téléphone, tandis que quand l’équipe d’Anisha visitait les domiciles des étudiants, seule la mère était là. Le projet de jardin potager va continuer et s’étendre à d’autres écoles des panchayats voisins l’an prochain, si la situation du Covid est sous contrôle.
Pendant les dernières minutes du webinaire, les assistants ont commenté que c’était très fort de voir Anisha de cette façon, même s’ils connaissaient déjà le projet.
Suzanne Renna a demandé si planifier pour le futur prenait en compte les défis du changement climatique.
Valli répondit que les chutes de pluie étaient un problème. Soit il ne pleut pas assez, soit la pluie est trop forte – il y a un problème chaque année. Rajan dit qu’ils avaient parlé avec les départements du gouvernement du changement du climat, promouvant la plantation d’arbres et la réduction des plastiques. Les relations avec les départements du gouvernement ont été renforcées pendant la pandémie.
Michelle O. Fried dit qu’elle était impressionnée par la façon intégrée de réaliser le projet – considérer les racines des causes et traiter les problèmes à la source. Plus que tout, dit-elle, « Votre façon de travailler avec les enfants est une inspiration pour moi, et nous allons envisager de le faire nous-mêmes avec les écoles locales. »
La question de la durabilité financière a été soulevée. Valli dit que le Centre de Ressources était un endroit où ils pouvaient cultiver et aussi, offrir un logement aux visiteurs. Mais, le revenu de cette activité n’était pas encore suffisant pour permettre au projet de fonctionner sans financement extérieur.
Deepak – le fils de Valli et de Rajan – dit qu’il était inspiré par l’action de ses parents et qu’il aime jardiner et partager des semences indigènes avec ses amis. Une graine a été plantée!
Vous pouvez voir et écouter la visite entière ici :
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